Objet : épidémie de Coronavirus
Monsieur le Ministre,
Nous constatons que vous n’avez pas répondu à ce courrier, ce que nous regrettons au vu de la situation inquiétante. Nous y posions plusieurs questions notamment celle du suivi médical, de la convocation systématique des CHS-CT, de la journée de carence, des conduites à tenir, ainsi que du respect des missions de chacun des personnels.
Nous constatons qu’un certain nombre d’obligations envers les personnels ne sont pas respectées dans les académies, ce qui a amené certaines de nos sections fédérales à mettre en œuvre la procédure d’alerte auprès des recteurs telle que prévue par l’article 5-7 du décret 82-453 modifié et ce pour l’ensemble des personnels à risque de l’académie, les DASEN ne pouvant être responsables d’une situation qui leur échappe.
Nous avions déjà souligné l’absence de réunion des CHSCT. Nous souhaitons aujourd’hui aborder la question des personnels à risques dans le cadre de cette procédure. Outre les personnes listées par le décret, il semble important de considérer que les personnes suivantes doivent être considérées parmi les personnels à risques au vu de l’épidémie en cours :
- Patients immunodéprimés (VIH, patient ayant une tumeur solide ou une hémopathie maligne, transplanté ou futur transplanté, greffé de cellules souches hématopoïétiques, biothérapie, corticothérapies ou immunosuppresseurs pour maladies auto-immunes ou inflammatoires chroniques, traitement par Soliris)
- Patients aspléniques, hypospléniques
- Patients insuffisants d’organes (insuffisants rénaux, hépatiques, cardiaques, pulmonaires),
- patients diabétiques, et/ou patients avec une pathologie neurologique.
Nous vous interrogeons donc pour savoir quelles consignes vous avez données aux recteurs pour que les services médicaux des rectorats disposent de la liste des personnels à risques et ce dans le cadre de l’article 28-2 du décret 82-453 modifié et connaître quelles dispositions ont été prises afin que ceux-ci bénéficient de la surveillance médicale particulière telle que prévue par l’article 24 du décret 82-453 modifié et l’article L.4624-2 du code du travail qui prévoit que :
- Tout travailleur affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou pour celles de ses collègues ou des tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail bénéficie d’un suivi individuel renforcé de son état de santé. Ce suivi comprend notamment un examen médical d’aptitude, qui se substitue à la visite d’information et de prévention prévue à l’article L. 4624-1.
- L’examen médical d’aptitude permet de s’assurer de la compatibilité de l’état de santé du travailleur avec le poste auquel il est affecté, afin de prévenir tout risque grave d’atteinte à sa santé ou à sa sécurité ou à celles de ses collègues ou des tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail. Il est réalisé avant l’embauche et renouvelé périodiquement. Il est effectué par le médecin du travail, sauf lorsque des dispositions spécifiques le confient à un autre médecin.
Pour le moment, vos consignes, telles qu’elles sont relayées dans les académies aux personnels, se limitent à une auto déclaration ou un autodiagnostic. Cela ne saurait être suffisant.
En effet, les arrêts de travail que seraient amenés à faire les médecins traitants des collègues reposent nécessairement sur un état maladif. Or des personnels à risque non malades doivent pouvoir bénéficier des autorisations d’absences prévues par l’instruction du 23 mars. En ce sens le rôle des services de médecine de prévention est primordial.
Nous vous demandons donc d’indiquer aux recteurs que dans cette situation urgente une simple attestation du médecin traitant pourra donner lieu aux autorisations spéciales d’absence telles qu’elles sont définies par l’instruction du 23 mars 1950.
La question du droit de retrait telle qu’elle est traitée dans la FAQ à laquelle il est demandé à tout un chacun de se référer, n’est pas conforme à la règlementation et amène certains de vos représentants locaux à contester à priori le droit de retrait. C’est le cas au Lycée Geoffroy St Hilaire dans l’Essonne par exemple.
Nous souhaitons rappeler que le droit de retrait doit pouvoir s’exercer dès lors qu’un personnel a un motif raisonnable de penser que sa santé ou sa vie sont en danger. Il n’est pas dans les prérogatives de l’administration de contester a priori ce droit. Si celle-ci le conteste ce doit être sur la base d’une enquête associant les membres du CHSCT et la réunion d’un CHSCT. Nous vous demandons donc de réactualiser la FAQ en fonction de ces éléments.
Par ailleurs, vous avez annoncé le recours au télétravail pour les personnels qui seraient amenés à rester chez eux. Dans ce cadre, de nombreux personnels nous ont indiqué qu’ils subissaient des pressions des autorités académiques, notamment dans l’Oise, pour faire du télétravail.
Nous voudrions vous rappeler que seuls deux textes réglementaires, le décret n° 2016-151 du 11 février 2016 et l’arrêté ministériel de 2018, fixent les modalités et les conditions de mises en œuvre du télétravail dans la Fonction publique.
Ces textes indiquent que doivent être respectés notamment le volontariat de l’agent, la fourniture de matériel, l’organisation du travail, le décompte du temps de travail. Nous vous demandons de rappeler aux recteurs qu’ils ont le devoir de respecter les textes réglementaires.
Nous constatons que les directeurs d’école, qui ne sont pas des supérieurs hiérarchiques, et qui sont épuisés par la surcharge de travail et le manque de décharge de service, sont une nouvelle fois mis en première ligne avec l’épidémie du Covid-19. Nous demandons le rétablissement de l’aide administrative aux directeurs supprimés par le gouvernement et le ministère. Nous demandons que ce rétablissement se fasse par des créations de postes de fonctionnaires.
Enfin, nous voudrions vous alerter sur les consignes contradictoires et incompréhensibles données par les recteurs. Ainsi, il est demandé dans le Tarn aux enseignants du premier degré lorsque leur école est fermée pour raison de coronavirus de venir y travailler.
Dans une école de Moselle à Woippy, école Cousteau), une classe est fermée parce qu’un élève a contracté le virus, mais l’école ne l’est pas. Au lycée Paul Valéry de Paris, un personnel de région, qui par ailleurs loge dans le lycée, est dans le coma depuis dimanche 8 mars, et deux autres personnels sont confinés chez eux depuis le lundi 9 mars, et la décision de fermer ce lycée n’est toujours pas prise au moment où nous écrivons ces lignes.
Nous pourrions malheureusement multiplier les exemples. Il est de votre responsabilité de protéger vos personnels. Ces questions urgentes appellent des réponses urgentes.
Dans l’attente, veuillez recevoir, Monsieur le Ministre, l’expression de notre entière considération.
Clément POULLET, Secrétaire Général de la FNEC FP-FO
Guy THONNAT, représentant de la FNEC FP-FO au CHSCT ministériel