Le gouvernement a dévoilé son projet de loi. Ce projet de loi reprend la totalité de ce qui était préconisé dans le rapport Delevoye. Les analyses et calculs que nous avons formulés se trouvent donc intégralement vérifiés : les 42 régimes existants, dont le code des pensions civiles et militaires, disparaissent.
- Le nouveau système « doit permettre de garantir un niveau de vie satisfaisant aux retraités, reflétant les revenus perçus pendant la vie active » (article 1). Aucune garantie donc de conserver les niveaux de pension actuels.
- Le même article 1 précise que «le gouvernement s’est engagé à ce que la mise en place du système universel s’accompagne d’une revalorisation salariale permettant de garantir un même niveau de retraite pour les enseignants et chercheurs que pour des corps équivalents de même catégorie de la fonction publique.». Comme tous les fonctionnaires de catégorie A perdent énormément avec ce système par points, on est très loin de la promesse que les enseignants n’y perdent pas ! Par ailleurs, rien pour les administratifs et tous les corps non enseignants !
- La caisse de retraite du régime universel devra fonctionner sur le principe de l’équilibre financier (article 1). S’il n’y a plus d’argent, il faudra compenser d’une manière ou d’une autre, en augmentant les recettes et/ou en diminuant les sorties, par exemple en allongeant la durée de cotisation obligatoire ou en diminuant les pensions. Le système de bonus/malus de l’âge d’équilibre (appelé également âge pivot) est maintenu dans la loi. Donc, contrairement à ce qui est dit dans la propagande gouvernementale, les futurs retraités nés entre 1963 et 1975 seront bien impactés par le régime universel par points.
- L’âge d’équilibre du malus/bonus augmentera avec l’espérance de vie (article 10).
- C’est bien l’Etat qui continuera de fixer le taux d’acquisition et de service via le Conseil d’administration de la Caisse nationale de retraite universelle (article 9). Ces taux seront fixés par ordonnance. Rappelons que le rapport Delevoye prévoit qu’il soit respectivement 1 point pour 10 euros cotisés (acquisition) et de 0,55 euros par point obtenu (service). Et que sur cette base ce sont des centaines d’euros perdus chaque mois sur les pensions des fonctionnaires.
Des simulations du gouvernement honteusement truquées qui cachent la volonté de paupériser les enseignants
Le gouvernement a mis en ligne des simulations censées nous convaincre du bien-fondé du régime universel par points. Plus personne n’y perdrait ! Miracle ou nouveau mensonge gouvernemental ?
La réponse est simple : le gouvernement dans ses simulations sur le système par points intègre une évolution hypothétique des rémunérations, alors que pour ses simulations sur le système actuel du Code des pensions, le gouvernement se base sur un décrochage du traitement indiciaire des enseignants sur le salaire moyen global. Cela ne permet aucune comparaison sérieuse entre les deux systèmes. Avec une volonté de dissimulation manifeste.
Prenant le « cas type » de Laurent, certifié, né en 1980 et commençant à travailler en 2002, et dont la rémunération augmenterait régulièrement de manière à compenser les pertes, le gouvernement prévoit avec son nouveau système un gain de 1 € à 4 € selon l’âge de départ.
Si ce collègue partait à 62 ans, il pourrait atteindre le 6ème échelon de la hors-classe et partir à la retraite dans le système actuel avec 2 804 euros*. Or, dans ses simulations, le gouvernement indique que dans le système actuel le collègue n’aurait que 2 359 euros : d’où vient cette différence ? Qu’ont-ils prévu pour faire baisser ce montant ? Cela permet en tout cas de masquer la perte due au régime universel par points.
La simulation présente comme déjà quantifiée, annuelle et fixe, l’augmentation des primes. Le même document évoque pourtant « une revalorisation progressive des primes actuellement en cours de négociation » … ! Le gouvernement est décidément prêt à tous les « bobards » (pour reprendre les termes du ministre lui-même) pour faire refluer la mobilisation, tant il en a peur.
Par ailleurs, nos simulations confirment la baisse drastique du montant des pensions qu’entraînerait le régime universel par points. Pour compenser, le gouvernement devrait considérablement augmenter les primes de Laurent. Si les primes et indemnités de ce collègue représentaient 9 % de sa rémunération totale, selon l’exemple donné par le gouvernement, le retard accumulé tout au long de sa carrière serait, dans le régime universel par points, de 19 093 points, soit l’équivalent de 1 269 euros en moyenne par mois.
Le gouvernement promet une compensation en « revalorisant » les primes et indemnités, mais :
1°) Les 10 milliards sur 17 ans annoncés par Blanquer sont très loin de pouvoir compenser les pertes. D’ailleurs il se
garde bien de parler d’augmenter la rémunération des fonctionnaires, ne serait-ce que pour compenser l’inflation. Il a donc bien l’intention de poursuivre sa politique de gel de la valeur du point d’indice inscrit dans le PPCR.
2°) Macron et Blanquer y voient une « occasion historique » de redéfinir le « métier » des enseignants : moins de congés, temps de travail annualisé, élargissement des missions, primes au mérite : les enseignants ne veulent pas de ce «métier du 21ème siècle ». Ils veulent le maintien de leurs statuts. Et le fait que le ministre prétende réserver ces dégradations aux plus jeunes est d’autant plus inacceptable. Comme les danseuses et les danseurs de l’Opéra de Paris, nous refusons d’être « la génération qui aura sacrifié les suivantes ».
3°) Qui peut croire à une promesse fumeuse de « revalorisation » sur 17 ans ? Personne !
Grève jusqu’au retrait ! Maintien du Code des Pensions civiles et militaires
Après la publication du projet de loi, voir ci-après nos simulations.
* Tous les montants sont en brut.
Fonctionnaires nés entre le 1er janvier 1963
et le 1er janvier 1975
Le malus
La pension reste calculée sur la base du code des pensions civiles et militaires. Il faut y ajouter cependant la question de l’âge pivot, appelé âge d’équilibre dans le projet de loi : le gouvernement n’a donc nullement renoncé à cet âge pivot censé garantir l’équilibre du système. Nous reprenons donc ci-dessous ce qui était prévu par le gouvernement.
Pour un départ à 62 ans, 10 % de malus sera appliqué ; pour un départ à 63 ans, 5 % de malus sera appliqué. Attention, ce malus ne vient pas en plus de la décote. On prend par contre le plus défavorable. Il est possible qu’il soit dégressif par trimestre (62 ans 1 trimestre, – 8,75 % ; 62 ans 2 trimestres, 7,5 % ; etc.). Nous n’avons aucune indication quant au devenir de la surcote entre 62 ans et 64 ans, il est dans la logique qu’elle soit supprimée, et ne soit appliquée qu’à partir d’un départ à 64 ans.
Enseignante (certifiée ou professeur de lycée professionnel) né avant le 1er janvier 1975 et décidant de partir à la retraite à 62 ans. La pénalité de l’âge pivot de 10 % s’applique.
Cette enseignante (certifiée ou PLP) avec deux enfants n’aurait pas eu de décote. Née en 1963, et entrée dans la Fonction publique à l’âge de 22 ans, peut partir en 2025 sans décote (160 trimestres de cotisation et 8 trimestres de bonification pour ses enfants lui permet d’atteindre les 168 trimestres pour un taux plein). Elle aura donc 10 % de décote liés à l’âge pivot. Avec 40 ans de carrière, elle part à la retraite au 6ème échelon de la hors classe, à l’indice majoré 798.
Sans réforme, cette collègue aurait perçu sa pension calculée sur la base du code des pensions :
798 x 56,2323 x 75 % = 33 655,03 euros annuels, soit 2 804,58 euros mensuels.
Avec la réforme et l’âge pivot, elle perd donc 10 % par mois, soit 280,45 euros par mois (et ce jusqu’à son décès).
Suite des simulations ici:
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