Lors du déplacement de F. Bayrou avec 5 ministres à Mayotte lundi 30 décembre, soit 16 jours après le passage dévastateur du cyclone Chido, E. Borne a reçu les organisations syndicales de personnels de direction et d’enseignants. Cette journée s’est terminée par une série d’annonces faites par le Premier ministre dans le cadre de ce qu’il appelle le plan « Mayotte debout ». Le gouvernement a‑t-il apporté des réponses à la hauteur de la catastrophe en cours ? Ce n’est pas le point de vue de nos syndicats. Vous trouverez en lien ici le courrier que la FNEC FP-FO avait adressé à la ministre le 24 décembre.
Une « rentrée » à partir du 13 janvier ?
Depuis le 18 décembre, FO a alerté le ministère : la rentrée le 13 janvier est impossible. Nombre d’écoles, de collèges et de lycées sont très fortement impactés, voire rasés. Nombreux sont pillés, vandalisés. Seul un tiers des personnels de l’Éducation nationale a pu être contacté d’après le Rectorat… L’urgence reste la mise en sécurité de tous, l’accès à une eau potable, à la nourriture, aux soins, à l’électricité. Les communications terrestres, aériennes et maritimes, les télécommunications ne sont pas totalement rétablies sur l’ensemble de l’île.
La ministre de l’Éducation nationale a précisé pendant l’audience que les décisions concernant la rentrée se feraient collectivement et que les syndicats y seraient associés. Pourtant, le soir même le Premier ministre a maintenu la rentrée « à partir du 13 janvier » pour les personnels, puis pour les élèves dans un deuxième temps, en fonction des établissements… évoquant même l’arrivée de « tentes-écoles » : beaucoup de bricolage, mais aucune garantie pour l’accès de tous à l’instruction.
Faut-il comprendre que, pour l’État, il est possible de continuer comme avant et dans des conditions encore plus chaotiques ? Pour rappel : à Mayotte, plus de la moitié des élèves sont concernés par un système d’enseignement en rotation, tandis que plusieurs milliers ne sont pas scolarisés. La FNEC FP- FO a toujours dénoncé cette situation.
La FNEC FP-FO réaffirme : le préalable, c’est la reconstruction, avec tous les moyens nécessaires, intégrant la présence de personnels en nombre suffisant, leur relogement et leur protection. Or, le ministère n’a pas apporté réponse concrète. Il parle de faire appel à des personnels de métropole sans que l’on sache qui (des étudiants, des retraités ?), combien, et dans quelles conditions.
On nous parle de préparation collective de la rentrée. Cela ne peut se faire qu’à la condition que l’État prenne ses responsabilités, que tous les représentants des services de l’État soient présents dans les réunions, pour répondre aux demandes des personnels et de leurs syndicats. Venir faire de la communication le temps d’une visite, et laisser les personnels se débrouiller seuls avec les élus locaux ensuite, ce n’est pas acceptable.
La FNEC FP-FO est à nouveau intervenue pour qu’une aide d’urgence soit octroyée sur simple demande à chaque agent a minima à même hauteur que pour les agents hospitaliers (qui toucheront 1 000 euros). FO a demandé que la réserve de précaution de l’action sociale ministérielle soit utilisée. Le seul engagement pris a été de faire partir un questionnaire aux agents via la boîte professionnelle pour récolter leur situation en vue d’octroyer des aides financières, sans préciser le montant. Un fond social est prévu également pour les élèves et les parents, mais rien de précis pour l’instant.
La question de l’attractivité de Mayotte a été abordée. La FNEC FP-FO rappelle ses revendications :
- Augmentation de la valeur du point d’indice et abrogation de la réforme des retraites Macron-Borne
- Hausse du taux d’indexation des salaires pour compenser le coût de la vie
- Instauration de l’ASA (Avantage Spécifique d’Ancienneté) dans l’ensemble du département
- Plan massif de titularisation de tous les contractuels qui le souhaitent
- Prime d’aide logement pour l’ensemble des personnels
- Revalorisation de la carrière des anciens agents de l’ex IERM, avec prise en compte de l’AGS
La ministre a seulement indiqué qu’une réunion aurait lieu au niveau national pour étudier les mesures d’attractivité.
Après le passage des ministres, les personnels restent livrés à eux-mêmes
Les personnels vont devoir continuer à préparer la rentrée dans des conditions chaotiques.
Depuis le passage du cyclone, seule une petite partie de la population a pu avoir accès aux distributions d’eau et de nourriture, parfois un pack d’eau et deux boîtes de conserve pour toute une famille. Certains n’ont rien eu et vivent sans toit, sans électricité. Les cultures de manioc, de bananes : tout a été détruit. La famine menace la population, les maladies aussi.
La situation est explosive
Le Premier ministre veut-il maintenir Mayotte dans un état de sous-développement permanent ? Concernant la reconstruction des écoles et des établissements du département, le projet de loi qui sera présenté en conseil des ministres le 3 janvier prévoit « des adaptations de la construction initiale, dans la limite d’une diminution ou d’une augmentation de 5 % de son gabarit initial. » Est-ce que cela signifie qu’il n’est pas prévu d’augmenter la taille des écoles ou le nombre de classes, alors que des milliers d’enfants n’étaient pas scolarisés avant le cyclone ?
Dans une telle situation, la FNEC FP-FO tient à exprimer son soutien total à la population et aux personnels de l’Éducation nationale et de l’ensemble des services publics de Mayotte s’efforçant de remplir leurs missions au mieux dans des conditions chaotiques.
Pour la FNEC FP-FO, cette situation prouve, s’il le fallait encore, que l’urgence n’est pas de réduire et encore moins de détruire les services publics au nom de l’austérité budgétaire et de l’économie de guerre, mais au contraire de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour protéger et répondre aux besoins de la population comme dans n’importe quel département.